Othman El Alamy : «Les intermédiaires devront s’adapter au développement de canaux de distribution alternatifs»

• «AUJOURD’HUI, NOUS AVONS DES REMONTÉES D’INFORMATIONS INDIQUANT QUE, DANS CERTAINS CAS, LES PROTOCOLES ÉTABLIS AURAIENT ÉTÉ SIGNÉS SANS TENIR COMPTE DE LA CAPACITÉ RÉELLE DES INTERMÉDIAIRES À LES HONORER».

• A CE JOUR, SEULE LA FNACAM RESPECTE LES DISPOSITIONS DE L’ARTICLE 285 DU CODE DES ASSURANCES QUI IMPOSENT AUX ASSOCIATIONS PROFESSIONNELLES DE FAIRE APPROUVER LEURS STATUTS PAR L’AUTORITÉ.

Othman El Alamy Secre?taire ge?ne?ral de l’ACAPS

Dans un précédent numéro, (www.lavieeco.com), nous avons exposé les difficultés traversées par les intermédiaires en assurance. Des commissions estimées peu avantageuses, une rentabilité très faible, une problématique de TVA qui persiste…, le réseau de distribution est mis à mal, surtout depuis la pandémie. A la lumière de ces éléments, l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS) a souhaité apporter certaines précisions, en la personne de Othman El Alamy, secrétaire général de l’autorité.

• Selon les intermédiaires, le réseau de distribution est en grande difficulté et une part non négligeable des agents risque tout simplement la faillite. Quelle est la situation de ce secteur aujourd’hui ?

Notre pays, comme le monde entier, fait face à une situation sans précédent engendrée par la pandémie du Covid-19. Les conséquences économiques sont énormes et la quasi-totalité des secteurs est touchée. Bien que moins impacté que d’autres secteurs tels que ceux du transport ou du tourisme, le secteur des assurances n’est pas en reste.

Aussi, nous comprenons les difficultés que peut traverser le réseau de distribution dans ce contexte et c’est pour cela d’ailleurs que la FMSAR et la FNACAM, en concertation avec l’autorité, ont annoncé la mise en place d’un dispositif d’aide aux intermédiaires les plus fragiles, en accordant une aide directe non remboursable de 12 000 DH aux 700 intermédiaires ayant les chiffres d’affaires les plus faibles. Un prêt, sans conditionnalités et pouvant couvrir 3 mois de charges, a été également mis en place pour l’ensemble des intermédiaires.

• Au-delà de la crise engendrée par la Covid-19, ces mêmes intermédiaires se plaignent de difficultés plus structurelles. Ils reprochent à l’autorité les mesures relatives à l’encaissement édictées par la circulaire de la DAPS en 2015 et qui ont abouti à une asphyxie de leur trésorerie. Votre avis sur ce point ?

Je souhaite tout d’abord préciser que la circulaire de 2015 a été de facto abrogée avec la publication de la circulaire générale de l’ACAPS en janvier 2019. Cette circulaire a néanmoins repris en partie les dispositions de la précédente. Pour comprendre l’objectif derrière les dispositions relatives à l’encaissement et au reversement des primes, il faut partir d’un principe simple : la prime d’assurance appartient à la compagnie et la commission revient à l’intermédiaire. Ce dernier peut être chargé d’encaisser la prime au profit de la compagnie, mais il n’est pas en droit de disposer comme il le souhaite de cette prime qu’il a l’obligation de reverser dans les délais réglementaires. Or, des pratiques malsaines ont perduré pendant longtemps et nous avons vu des intermédiaires confondre leur argent avec celui de la compagnie et l’ont utilisé à des fins personnelles. Dans d’autres cas, les clients n’ont tout simplement pas reversé les primes aux compagnies d’assurances. Il arrive aussi que l’intermédiaire donne, parfois de bonne foi, des facilités de paiement de son propre chef, sans accord de la compagnie, auquel cas celle-ci pourrait lui demander d’en assumer les conséquences. Bien évidemment, si les facilités ont été accordées avec le consentement formel de la compagnie, l’intermédiaire serait alors déchargé de toute responsabilité. Dans tous les cas, ces pratiques ont conduit à une accumulation de soldes d’intermédiaires chez les compagnies. L’autorité ne pouvait laisser cette situation perdurer car elle faisait peser un risque démesuré sur les intermédiaires et sur les compagnies. L’approche qui a été adoptée par la DAPS à l’époque a été pragmatique, en séparant les soldes antérieurs, des flux postérieurs à la circulaire. La circulaire a exigé le strict respect de la réglementation pour les flux futurs. Pour les soldes antérieurs, un délai a été accordé pour que les rapprochements puissent être effectués. Les entreprises d’assurances ont également été incitées à ne pas exiger le paiement intégral et immédiat mais plutôt à établir des protocoles pour échelonner le paiement des soldes dus sur une période à convenir avec les intermédiaires.

Aujourd’hui, nous avons des remontées d’informations indiquant que, dans certains cas, les protocoles établis auraient été signés sans tenir compte de la capacité réelle des intermédiaires à les honorer. Pour faire face à cette situation, nous avons mis en place un groupe de travail incluant l’autorité, la FMSAR et la FNACAM, afin de travailler sur cette problématique et d’y apporter les solutions adéquates. Ce groupe travaillera également sur les modalités techniques d’encaissement afin de nous assurer que le problème d’accumulation des soldes des intermédiaires ne se reproduise plus à l’avenir.

• Les intermédiaires se plaignent également du niveau de commissionnement dont le taux n’a pas été revu depuis des décennies. Une correction à la hausse est –elle envisageable à l’avenir ?

Partout dans le monde, les taux de commission sur les services ont plutôt tendance à baisser. Pourquoi un assuré continuerait-il de payer une commission de 10% ou de 12% pour un service auquel il pourrait demain avoir accès sur internet par exemple.

En réalité, c’est l’augmentation du volume et de la taille du marché qui compense la baisse des taux. Les intermédiaires vont devoir s’adapter à une nouvelle donne qui interviendra de manière inéluctable: celle du développement de canaux de distribution alternatifs, notamment digitaux. Ils devront le faire en proposant des services à plus forte valeur ajoutée et en diversifiant leur activité et leurs sources de revenus. Nous sommes disposés à les aider dans cet effort d’adaptation et à les accompagner, notamment en favorisant l’évolution de la réglementation qui limite actuellement leur champ d’activité.

• Vous avez cité à maintes reprises la FNACAM. La loi 64-12 a prévu une représentation diversifiée des intermédiaires. Pourquoi privilégiez-vous la FNACAM ?

Vous avez raison : la loi 64-12 parle d’associations au pluriel. De ce fait et dans le respect de la loi, l’ACAPS ne s’immisce pas dans le choix des représentants des intermédiaires.

Pour mener à bien notre mission, dans l’intérêt du marché et des intermédiaires eux-mêmes, nous souhaitons avoir des interlocuteurs crédibles et constructifs, avec lesquels nous pouvons faire avancer les réformes et traiter les problématiques du secteur des assurances et de la distribution en particulier. Et je dois admettre que nous sommes globalement satisfaits des relations avec la FNACAM, même si nous avons des divergences sur certains points et que les discussions peuvent être ardues.

J’aimerais préciser également, qu’à ce jour, seule la FNACAM respecte les dispositions de l’article 285 du code des assurances qui imposent aux associations professionnelles de faire approuver leurs statuts par l’autorité. Il est évident que nous ne pouvons pas interagir avec des associations qui ne respectent pas la loi. En revanche, nous interagirons avec toutes les associations qui s’y conformeront.

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LVE

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