AMO des indépendants : Les médecins maintiennent leur proposition, expertise à l’appui

Les instances syndicales représentant les médecins se sont réunies avec le conseil national de l’Ordre des médecins au sujet de la couverture sociale des indépendants. Au cœur des discussions, la cotisation des médecins généralistes et spécialistes. Ces derniers défendent leur proposition, expertise à l’appui.

AMO des indépendants : Les médecins maintiennent leur proposition, expertise à l'appui

En prévision d’une réunion entre le conseil national de l’Ordre des médecins et le ministère du Travail, prévue la semaine prochaine, au sujet du dossier de l’AMO et la retraite des indépendants, les instances syndicales de la profession ont rencontré l’ordre, ce lundi 5 octobre, pour arrêter leur position.

Selon une source sûre jointe par Médias24, les syndicats représentant les médecins maintiennent leur position inchangée et insistent que la proposition qu’ils ont déjà formulée au gouvernement est celle qu’ils défendront.

Pour rappel, les médecins du privé ont formulé la proposition de cotisation mensuelle suivante :

– 590 DH pour les médecins généralistes.

– 700 DH pour les médecins spécialistes.

Les premières concertations avec les médecins ont échoué jusqu’ici, car ces derniers ont refusé la proposition du gouvernement relative aux revenus cotisables, à savoir, 8 fois le SMIG pour les généralistes et 12 fois pour les spécialistes. Les taux de cotisation de 10% pour la retraite et 6,37% pour la couverture maladie, sont quant à eux fixes et appliqués à toutes les professions sans exception.

« Notre proposition est généreuse par rapport aux données de l’expertise que nous avons réalisée », avait commenté Dr Said Afif, président du Collège syndical national des médecins spécialistes privés (CSNMSP).

Médias24 détient une copie du rapport final de l’expertise, sur laquelle le CSNMSP s’est basé pour formuler sa proposition.

Le but de l’expertise est « de proposer des revenus cotisables qui soient pratiques, représentatifs des coûts des prestations et aptes à assurer un financement pérenne et solidaire de la couverture maladie », lit-on à l’introduction du rapport.

« La cible de revenu cotisable discutée se situerait vers les 10.000 DH/mois, c’est-à-dire près de 4 fois le SMIG, plutôt que les 2 fois et 3 fois le SMIG énoncés publiquement, soit 5.140 Dhs pour les généralistes et 7.710 Dhs pour les spécialistes. Les cotisations doivent refléter le fait que la couverture n’est pas dédiée aux seuls médecins, mais à l’ensemble de la population AMI (assurance maladie des indépendants) : les médecins sont donc appelés à contribuer au financement de la couverture des moins nantis », est-il énoncé.

« Autant il nous apparaît illusoire de limiter le revenu cotisable à 2 ou 3 fois le Smig, autant il nous apparaît réaliste de présenter l’approche qui base les cotisations sur 3 fois le Smig en début et fin de carrière et 4 fois entre les deux. À des fins administratives, la CNSS devrait être facile à convaincre qu’une approche basée sur l’âge est beaucoup plus simple à gérer, quel que soit le secteur d’activité exercée par le travailleur indépendant touché. La date de naissance est un critère invariable, peu importe le domaine d’activité. Et les besoins en soins de santé aussi, dans une certaine mesure. Il nous apparaît aussi juste, équitable et simplement réaliste d’utiliser un revenu cotisable réduit en fin de carrière et à la retraite », conclut le rapport d’expertise en ce qui concerne l’approche globale.

Voilà sur quoi se base la proposition des médecins

Sur la partie assurance maladie, le rapport d’expertise prend comme point de comparaison, les consommations de soins et les cotisations moyennes annuelles connues à la CNSS et la CNOPS car la cotisation exigible doit être représentative de la consommation de soins anticipée et des frais de gestion inhérents. Ainsi, les cotisations moyennes prises en compte sont :

-CNSS : consommation + ou – 1.200 DH par cotisant, cotisations + ou – 2.000 DH par cotisant

-CNOPS : consommation + ou – 3.300 DH par cotisant, cotisations + ou – 3.200 DH par cotisant

« La distribution d’âge des médecins est plus près de celle de la CNOPS et convient mieux comme base d’évaluation. Compte tenu des frais de gestion et des marges raisonnables de fluctuation, une majoration éventuelle de la cotisation moyenne à la CNOPS à 4.200 DH, soit + ou – 350 DH par mois ou 6,37% de 2xSMIG est sans doute réaliste », est-il avancé au niveau de l’expertise.

Toujours selon l’expertise, des points supplémentaires sont toutefois à considérer pour mieux cerner les coûts de la couverture maladie des médecins :

– La consommation de soins des médecins du secteur privé est influencée par une part d’auto-traitement ou d’auto-partage avec les confrères. La distribution des coûts des réclamations par catégorie de soins peut en être modifiée à la baisse. Ceci s’apparente à ce qu’on identifie comme le petit risque, généralement traduit par la consommation de moins de 5.000 DH annuellement, qui représente environ 10% des coûts d’un régime.

– La durée des études en médecine a aussi un impact sur le moment de l’entrée sur le marché du travail, particulièrement pour les spécialistes. Une population plus âgée conduit par ailleurs à la hausse du taux de prévalence des ALD/ALC qui constituent pas loin de la moitié des coûts des régimes et sont en plus remboursés à un pourcentage plus élevé. Avec 40% de médecins âgés de 60 ans et plus, on peut raisonnablement estimer que ces phénomènes s’annulent.

– Avec beaucoup de médecins déjà dans la soixantaine, la couverture des retraités va naturellement prendre de l’ampleur avec les années. Outre le fait qu’ils vont nécessairement consommer davantage de soins, leurs cotisations vont diminuer.

« Selon la distribution d’âge actuelle, ceci produirait une cotisation mensuelle moyenne de 590 DH, ou 7080 DH par année, l’équivalent de 6,37% de 3,6 fois le SMIG. Aucune distinction n’est faite entre généralistes et spécialistes, mais les chiffres pourraient être remaniés pour se rapprocher des attentes », est-il avancé dans le rapport d’expertise. A ce niveau, les syndicats des spécialistes ont consenti une cotisation plus importante (700 DH) que celle des généralistes comme précisé plus haut.

« Plus élevée de 315 DH que le coût mensuel moyen de 275 DH des prestations du cotisant CNOPS, cette cotisation moyenne de 590 DH couvre amplement le risque de la couverture de la population des médecins, une fois ce risque ajusté pour tenir compte de la générosité moindre du régime CNSS. Et axée sur le SMIG qui est appelé à augmenter dans le temps, elle assure aussi une certaine pérennité à long terme. Elle comprend également une forte marge de solidarité avec l’ensemble de la population AMI », poursuit l’expert.

« Si on évalue le coût propre aux médecins à 275 DH de prestations auxquels on ajoute 10% de frais de gestion et 20% de marge prudentielle de fluctuation, pour un coût mensuel potentiel estimé à 355 DH, la marge de solidarité résiduelle représente + ou – 235 DH, soit quelque 40% de la cotisation », ajoute-t-il.

Les concertations pour la retraite reportées

Pour ce qui est de la retraite, les concertations entre les médecins libéraux et le gouvernement ont été reportées à une date ultérieure. Donc les discussions portent essentiellement sur l’AMO.

Cela dit, le rapport d’expertise s’est également attardé sur la question de la retraite. Il avance que le régime mis en place par la CNSS est « un régime par point. Selon l’information reçue, la valeur d’acquisition du point est de 12 DH et la valeur du point de 1 DH : une cotisation de 12 DH donnerait donc droit à 1 DH de rente. De plus le médecin doit cotiser au taux de 10% sur le même revenu que celui sur lequel il cotise pour la couverture maladie »

Partant des données recueillies auprès de la CNSS, l’expert avance « qu’il est primordial de voir si l’offre est intéressante : le rendement pour le médecin dépend uniquement de ses cotisations, pas pour moitié de celles de l’employeur. Elle doit suffire à couvrir au moins les cotisations maladie au moment de la retraite ».

« Le coût de 738 DH par mois correspond à 10% de 7.380 DH de revenu mensuel, soit un peu moins que 2,9xSMIG. Si on optait plutôt pour une rente mensuelle de 600 DH à l’adhésion, majorée de 15 DH par année écoulée depuis l’adhésion jusqu’à la retraite, un adhérent de 35 ans toucherait une rente mensuelle de 1125 DH, celui de 55 ou 60 ans une rente mensuelle de 750 DH. Cet arrangement porte la cotisation mensuelle moyenne à 580 DH, soit à peu de chose près le même niveau que pour la maladie. La rente suivrait ainsi à peu près l’évolution des coûts moyens de la couverture maladie. Cette option permettrait de plus de satisfaire à l’obligation de cotiser sur le même salaire pour la retraite et la maladie », est-il expliqué sur le rapport d’expertise.

« Il faudra valider auprès de la CNSS dans quelle mesure le régime à points génère une rente suffisante pour défrayer dans le temps la cotisation maladie. À vue d’œil, avec une valeur d’acquisition du point de 12 DH et une valeur de rente de 1DH par point, il faudrait environ 12 ans de cotisation pour avoir droit à une rente suffisante à cette fin. Pour la majorité des participants cela ne pose pas de problème. Pour ceux qui sont plus près de la retraite, le droit de cotiser davantage devrait leur permettre d’y arriver sans trop de difficultés », conclut le rapport.

Hayat Gharbaoui

Le 06 octobre 2020- Médias24 - Journal économique marocain en ligne

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