Rapport sur la stabilité financière
La crise sanitaire enclenchée en 2020 a, certes, impacté la rentabilité du secteur financier au Maroc. Mais ce dernier demeure globalement résilient au choc, eu égard à la solidité des fonds propres du secteur bancaire qui demeurent supérieurs aux minima réglementaires et à la marge de solvabilité du secteur des assurances qui reste à des niveaux largement au-dessus du seuil réglementaire.
Le secteur financier marocain demeure globalement résilient, en dépit du choc sanitaire et ses répercussions sur la rentabilité des institutions financières. Le constat est de Bank Al-Maghrib (BAM) dans son Rapport 2020 sur la stabilité financière publié en collaboration avec l’AMMC et l’ACAPS, les régulateurs des marchés financiers et des assurances. Les données fournies dans le document illustrent l’impact de la crise sur les performances du secteur bancaire en 2020. En effet, le résultat net agrégé des banques a accusé l’exercice écoulé un net repli de 43,2% à 6,8 milliards de dirhams. Soit la baisse la plus importante observée durant les dix dernières années. Cette contreperformance résulte notamment d’une forte augmentation du coût du risque (+74,1%) et d’une hausse des charges non courantes des banques suite à leur contribution au fonds spécial Covid-19. La rentabilité moyenne des actifs (ROA) ressort ainsi en baisse à 0,5% après 0,9% en 2019 et celle des fonds propres (ROE) à 4,8% contre 9,4% une année auparavant. Malgré ce contexte, les banques continuent d’afficher des fonds propres supérieurs aux minimas réglementaires bénéficiant des mesures de soutien au secteur bancaire et aux agents économiques. Sur base sociale, le ratio de fonds propres moyen du secteur bancaire s’est ainsi établi à 15,7% contre 15,6% une année auparavant et 14,7% en 2018. Le ratio Tier 1, pour sa part, s’est situé à 11,4% contre 11,5% et 10,9% respectivement en 2019 et 2018. Dans ces conditions, l’exercice du macro stress de solvabilité basée sur les projections économiques de BAM de juin 2021 continue de démontrer à cette date la capacité des banques à faire face globalement au choc induit par la crise de la Covid-19 et à maintenir le respect des exigences réglementaires, grâce notamment aux matelas en fonds propres qu’elles avaient constitués ces dernières années et à la mise en application par le secteur bancaire de la recommandation de la Banque centrale de la non-distribution des dividendes, détaille le rapport.
Assurances : merci le Régime obligatoire de couverture des catastrophes !
Le Régime obligatoire de couverture des catastrophes a nettement dopé les performances des assurances en 2020 dans un contexte de crise. Il a ainsi généré pour le régime assurantiel, des primes émises de 476,7 millions de dirhams. Globalement, le volume des primes a atteint 45,1 milliards de dirhams, entrainant ainsi une croissance de 1%, en décélération par rapport à 2019 (+8,6%). Fortement exposé au marché des actions, le secteur des assurances a durement subi la contraction du marché boursier dans le sillage de la crise sanitaire. Ainsi, explique le document, malgré la bonne performance de la marge d’exploitation, le résultat net agrégé des entreprises d’assurances cède 21% à 2,9 milliards de dirhams, impacté essentiellement par la chute du solde financier. Le ROE diminue aussi de 2,3% pour ressortir à 7,3%. Enfin, le ratio des plus-values latentes se détériore en passant de 18,5% en 2019 à 13% en 2020. Pour sa part, la marge de solvabilité a également subi une baisse, mais reste à des niveaux largement au-dessus du seuil réglementaire. Ne couvrant à ce stade que le risque de souscription, l’excédent de la marge devrait baisser de manière significative avec le passage vers le régime prudentiel de solvabilité basée sur les risques qui couvre une palette plus large de risques auxquels est exposé le secteur. Par ailleurs, les exercices de stress tests réalisés par la Banque centrale font ressortir une bonne résilience des entreprises d’assurances aux chocs sur le portefeuille actions et immobilier et aux conditions macroéconomiques et techniques défavorables.
Pour la retraite, le rapport indique que les principaux régimes affichent une situation financière difficile, marquée globalement par l’importance de leurs dettes implicites et par l’épuisement de leurs réserves à divers horizons. La réforme systémique de la retraite devrait permettre d’instaurer une tarification équilibrée, mais également de résorber, dans des proportions importantes, les engagements passés non couverts, et partant de rétablir les équilibres financiers dans le futur. Le document note que l’étude relative à la conception technique de scénarios dans le cadre d’un système à deux pôles (public et privé) est à un stade avancé.
Solidité avérée des infrastructures des marchés financiers
Les infrastructures des marchés financiers (IMF) ont démontré en 2020 une forte résilience aussi bien sur le plan financier que sur le plan opérationnel. Les IMF notamment systémiques ont, en effet, affiché des niveaux de fiabilité et de disponibilité satisfaisants, affirme le rapport, permettant aux participants d’émettre leurs instructions de paiement et de procéder à leur règlement dans les meilleures conditions de sécurité. En outre, l’évaluation de la résilience des IMF, selon les 24 principes pour les infrastructures des marchés financiers (PIMF) édictés par la Banque des règlements internationaux, a fait ressortir un niveau de risque faible pour la stabilité financière quasi identique à celui enregistré en 2019. Pour les auteurs du rapport, les développements liés aux innovations technologiques et aux changements climatiques continuent de constituer des défis importants pour la stabilité financière et les régulateurs s’attellent à la mise en place d’un cadre approprié de surveillance des risques y afférents. Encore une fois, la Banque centrale rappelle que la prise en compte des risques financiers liés aux changements climatiques devient une priorité incontournable qui fait l’unanimité de l’ensemble des autorités et organisations internationales financières. La Banque assure, par ailleurs, œuvrer à la conception de stress tests climatiques sur la base de scénarios de chocs préconisés par les institutions internationales et inspirés des expériences des banques centrales les plus avancées en la matière.
Saïd Naoumi, Lematin.ma