C’est presque devenu un maronier de fin / début d’année. Au moment où les observateurs se lancent dans leurs traditionnelles et rituelles prédictions, la question affleure, tôt ou tard : et si les GAFA faisaient main basse sur l’assurance ? Le titre du présent article n’est qu’une adaptation de celui accompagnant un texte repéré dans les colonnes du Insurance Innovation Reporter entre Noël et le Jour de l’an. Pourquoi dès lors remettre le sujet en exergue ? Et bien, lorsque le journaliste Greg Murphy assène dès le début du deuxième paragraphe : « Pour faire court, la réponse est oui », on se dit que le thème n’est peut-être finalement pas si éculé.
Un assuré sur deux prêt à céder aux sirènes des Big Tech
L’assurance est lancée dans une transformation digitale de grande ampleur, c’est désormais une évidence. Plus de retour en arrière possible. Tous les chiffres concordent vers un basculement à marche forcée. D’ici 2025, Accenture estime ainsi que 140 milliards de dollars de revenus vont basculer de l’assurance traditionnelle vers des produits digitaux. Et, comme souvent, ce sont évidemment les clients qui dictent le tempo.
Leur appétence grandissante pour les usages numériques trouvent confirmation dans les courbes d’acquisition impressionnante des insurtechs. L’an passé, Lemonade a dépassé le cap du million d’assurés, et Luko les 200 000, pour ne citer qu’eux. Quant à leur rapport aux géants de la tech, la tendance est là aussi édifiante. A la question : « seriez-vous prêts à souscrire une assurance auprès d’un de ces acteurs ? », 17% répondaient favorablement en 2016. Cinq ans plus tard, ils sont plus de 50% – selon le dernier World Insurtech Report de Capgemini !
Les géants avancent leurs pions
Il n’est point besoin d’expliquer aux Big Tech l’intérêt qu’ils peuvent tirer de ces nouveaux usages. Au fil de l’année écoulée, plusieurs annonces ont retenu notre attention, et confirmer la sensation qu’ils accélèrent :
- les multiples partenariats noués par Amazon, respectivement avec Next, Marsh et Nationwide aux Etats-Unis, avant de se rapprocher de nous à la faveur d’une collaboration avec un courtier anglais ;
- le gros coup de Tesla, qui a officiellement lancé son assurance à la demande au Texas et dans l’Illinois ;
- la stratégie d’Apple autour de la santé qui se dessine encore un peu plus avec les dernières fonctionnalités d’iOS15 ;
- le rapprochement entre Baidu et Swiss Re, pour travailler autour de la voiture autonome et établir potentiellement de nouvelles règles du jeu ;
- Chez Google, le recrutement de l’incontournable Nigel Walsh au poste de Directeur de la branche assurance.
Nigel Walsh a d’ailleurs profité de la publication susmentionnée pour lancer une perche au secteur, ou sinon son intention de se montrer offensif. Dans le monde de l’assurance de demain, la data sera le nerf de la guerre. Et qui maîtrisent mieux cet or noir que les Big Tech ? Que ce soit par leur capacité inégalée à collecter les données (voir le modèle Tesla ou les objets connectés avant-gardistes concoctés par les GAFA) et à les exploiter avec pertinence (coucou Amazon), les puissants disposent de la créativité comme de la force de frappe nécessaire pour renverser l’ordre établi. Ce n’est peut-être par leur intention dans l’immédiat et l’on ne s’assurera certainement pas chez Google dès 2022. Tout peut cependant aller très vite et les mois à venir s’annoncent encore animés. Aux assureurs de démontrer qu’ils sont capables de suivre le rythme et de se muer en partenaires de choix dans cette palpitante course à l’innovation.