Le Maroc entreprend une transformation significative de son approche en matière de protection de son secteur agricole. Il s’apprête à mettre en place un système d’assurance indicielle innovant visant à mieux gérer les risques liés à la sécheresse. Cette initiative, élaborée en partenariat avec la Banque mondiale, devrait permettre au gouvernement marocain de transférer une partie du fardeau financier inhérent aux conditions climatiques imprévisibles, tout en assurant une gestion plus efficace de ces risques.
Le système d’assurance indicielle diffère considérablement de l’assurance agricole traditionnelle en ce qu’il repose sur des indices météorologiques tels que l’humidité, les précipitations et la température, ainsi que sur des données satellite. Au lieu de baser ses tarifs sur la probabilité de pertes en fonction du rendement de l’année précédente, l’assurance indicielle verse des indemnisations en fonction de ces indices prédéfinis pour compenser les pertes liées à des phénomènes météorologiques ou des catastrophes naturelles. Cela représente un changement fondamental dans la manière dont le secteur agricole du Maroc est protégé contre les aléas climatiques.
Selon la Banque mondiale, l’assurance indicielle offre une gestion des sinistres plus rapide et objective, contribuant ainsi à renforcer la lutte contre la pauvreté en réduisant l’impact financier des aléas climatiques sur les agriculteurs. Actuellement, le gouvernement marocain assume la responsabilité des conséquences de la sécheresse, mobilisant des dépenses d’urgence pour soutenir l’approvisionnement en nourriture animale, l’irrigation des cultures et l’approvisionnement en eau potable dans les régions touchées. Ces dépenses sont non seulement coûteuses, mais elles représentent également un risque pour la gestion des finances publiques, pouvant entraîner la déprogrammation d’autres actions essentielles. Le passage à l’assurance indicielle vise à remédier à ces problèmes en établissant une base plus stable pour la protection des agriculteurs.
L’assurance indicielle aura également un impact significatif sur la capacité du gouvernement à faire face aux situations d’urgence et à apporter une assistance aux populations vulnérables, tout en transférant la gestion des risques imprévisibles vers le système d’assurance. Cette transition contribuera à éviter des interruptions dans les services publics et à préserver le budget d’investissement.
Le Maroc, en tant que pays vulnérable aux aléas climatiques tels que la sécheresse en raison de sa situation géographique, sait combien l’agriculture est cruciale pour son économie. Environ 13 % de la valeur ajoutée du PIB national provient du secteur agricole, employant près de 4 millions de personnes, soit près de 40 % de la population active et 80 % de la population rurale. Le gouvernement est déterminé à réduire la vulnérabilité de la production agricole aux aléas climatiques et à encourager les investissements dans ce secteur clé.
L’adoption d’une stratégie triennale, lors de l’Assemblée générale de l’Organisation des autorités africaines de contrôle des assurances (O2ACA), organisée ce 12 octobre à Marrakech par l’ACAPS (Autorité de Contrôle des Assurances et de la prévoyance Sociale), constitue un autre jalon important. Cette organisation, basée au Cameroun, a centré son séminaire inaugural sur les « risques climatiques et résilience ». L’objectif était d’aider les régulateurs africains à mieux comprendre les impacts des risques climatiques sur le secteur de l’assurance et à s’inspirer des meilleures pratiques internationales en matière de gestion des risques. Cette initiative s’inscrit dans la volonté du Maroc de jouer un rôle de leader dans la coopération internationale pour promouvoir le développement durable, notamment en matière de lutte contre le changement climatique.
« Le Royaume affiche la ferme volonté de donner une impulsion forte à la coopération interafricaine visant à renforcer les capacités de lutte contre le changement climatique au Maroc et dans le reste du continent, notamment à travers la mobilisation de l’action collective pour relever les défis urgents. relatifs aux risques climatiques en Afrique», souligne Othman Khalil El Alamy, président par intérim de l’ACAPS aux membres de l’O2ACA
Le secteur de l’assurance au Maroc est également en train de s’adapter à cette nouvelle réalité en développant des produits d’épargne « verts », en investissant dans des valeurs écologiques et à valeur ajoutée, et en élargissant l’offre de couverture des risques climatiques. Les autorités marocaines s’engagent à progressivement opter pour des investissements éco-responsables et à développer des solutions pour faire face aux risques environnementaux.
Le Royaume Chérifien poursuit ainsi sa quête de résilience face aux aléas climatiques, tout en montrant la voie à suivre pour d’autres pays confrontés aux mêmes défis. Ce nouvel engagement dans la gestion des risques climatiques devrait contribuer à protéger le secteur agricole et à promouvoir un développement durable au Maroc et en Afrique.
François Olivier Edime – 212assurances – 13 octobre 2023